Portraits

Portrait - Michel, éco-constructeur depuis 22 ans

Mis à jour le 02/05/2024

Michel BROCHU

Basé à Nort-sur-Erdre (44), Michel Brochu, 56 ans, est artisan spécialisé en éco-construction (adhérent ARBA). Depuis 2000, il maîtrise, avec son équipe, toutes les étapes de construction et de rénovation de bâtiments bio-climatiques. L’atelier Isac compte aujourd’hui 44 personnes.

« A l’époque, on a presque tout découvert, il n’y avait pas de fournisseurs, pas de DTU*, les chantiers étaient hors cadre pour les assurances, il fallait chercher les infos à l’étranger, en Allemagne, Autriche ou Angleterre. » Depuis, la demande s'est développée, et Michel a propulsé le bio-sourcé dans sa coopérative, ARBA, qu'il a intégrée en 2005. « J’utilisais la ouate de cellulose anglaise, non référencée à la coopérative. Ils l’ont mise au catalogue et ont rapidement atteint deux semi-remorques par mois. Idem pour les fibres de bois, une fois référencées, les collègues ont testé et adopté. » 

Un peu de technique

La terre, la chaux, le lin, le coton, le chanvre et la paille sont utilisés depuis des siècles, la fibre de bois est, quant à elle, une technique plus récente. Ces matériaux bio-sourcés (issus du végétal) ou géo-sourcés (provenant de la terre) sont renouvelables. Ces isolants naturels ont d’autres qualités : leur masse est 2 à 3 fois supérieure à celle d’une laine minérale ou polystyrène et leur matière est perspirante (la vapeur d’eau migre de l’intérieur vers l’extérieur des murs), offrant ainsi un air plus sain, été comme hiver. « Bien sûr, pour les installer, il faut apprendre les bases, connaître les règles de la physique du bâtiment : organiser les matériaux du mur pour lui donner des qualités au-delà de l’isolation et de la performance thermique, l’acoustique par exemple. » Michel précise que cela demande beaucoup de rigueur en conception, car les matériaux biosourcés sont valables pour tout mais pas n’importe où. « Avec tout ce qui est enfermé dans une paroi, donc inaccessible, on n’a pas le droit à l’erreur, sinon il y a un risque de sinistralité (moisissures, champignons, mérule) ». 

Le bio-sourcé se démocratise

De plus en plus d’architectes prennent en compte les avantages des bio-matériaux. Michel explique : « Ils sont utilisables pour la rénovation comme pour le neuf, et offrent une régulation naturelle : les murs emmagasinent l’énergie et la restituent, stockent le chaud comme le froid ; c’est le principe de la maison bio-climatique. C’est de la clim’ naturelle, sans entretien et saine. Nos maisons sont construites pour durer 100 ans, avec une qualité de vie et de bien-être ». Les collectivités commencent aussi à s’orienter vers ces matériaux qui présentent des intérêts en termes d’économies d’énergie et de durabilité. Par exemple, près de Nantes, 36 tonnes d’argile issues des fondations d’un centre de loisirs ont permis de fabriquer les briques utilisées pour sa construction. Comparé à un matériau minéral (type laine de roche), l’extraction et la transformation de cette matière première est peu coûteuse en énergie grise (quantité d’énergie consommée au cours du cycle de vie d’un produit ou bâtiment). Un des prochains projets de l’atelier ISAC est un bâtiment public de 1300m² qui sera édifié en “paille-terre”, à Guenrouet (44). Pour répondre aux besoins, il existe maintenant des filières locales comme Biofib’, en Vendée, une usine de chanvre en circuit court, ou Pavatex, qui fabrique de l’isolation en fibre et laine de bois. Leurs produits sont tous référencés par la coopérative ARBA.

Et la formation ?

Aujourd’hui, il existe des formations pour les artisans, comme Pro-Paille en Vendée par exemple, qui propose 35h de formation. « On espère bientôt un vrai module sur le bio-sourcé. A la CAPEB, j’interpelle les adhérents sur l’intérêt de former des apprentis qui pourront diffuser leurs connaissances sur les chantiers. », commente Michel, qui complète : « Il faut faire évoluer les techniques ; c’est aussi une question environnementale. On manque de sable alors que des tonnes de paille sont perdues tous les ans. Avec seulement 10% de cette paille, on pourrait isoler tous les bâtiments construits en une année en France. » 

Michel Brochu

Un homme pressé ?

Quand il ne porte pas sa casquette d’artisan, Michel partage le reste de son temps entre sa famille et ses engagements auprès de réseaux professionnels, associatifs, et de sa commune. Il est, en effet, conseiller municipal de Nort-sur-Erdre, dans la commission urbanisme et bâtiment, et vice-président U2P régional (3ème organisation patronale qui représente les artisans bâtiment, services, alimentation). Enfin, depuis 20 ans à La CAPEB, Michel y est vice-président de la CAPEB 44, de la CAPEB Pays de la Loire et administrateur de la CAPEB National. Il constate que tout se complexifie en France. La CAPEB apporte aux TPE et PME un soutien, notamment sur le plan administratif et « défend les intérêts des artisans auprès de l'État, du conseil régional, des institutions, etc. [...] C’est comme la coopérative, c’est un bel outil. Elle nous appartient, à nous de la faire vivre, de participer aux groupes de travail. On est tous convaincus de son utilité. »